Le 6 mai 2025, la troisième édition de la Nuit du Bien Commun s’est tenue au Grand Théâtre de Tours, un gala caritatif visant à lever des fonds pour des associations locales. Derrière l’image d’un événement solidaire, cette soirée a suscité une forte opposition, notamment de la part de collectifs antifascistes, syndicats et partis de gauche, qui dénoncent une tentative d’instrumentalisation idéologique et des liens avérés avec l’extrême droite.

La Nuit du Bien Commun se présente comme un événement apolitique, destiné à soutenir des projets associatifs dans les domaines du social, de la santé et de l’éducation. Pourtant, son cofondateur Pierre-Édouard Stérin, milliardaire exilé fiscal en Belgique, est un acteur majeur du financement de la droite radicale en France. À travers son projet Périclès, il injecte des millions d’euros dans des think tanks* conservateurs et soutient des figures politiques proches de l’extrême droite.

Stérin a également tenté de racheter des médias comme Marianne et Valeurs Actuelles, et finance des publications réactionnaires comme L’Incorrect. Son ambition affichée est de structurer une droite conservatrice capable de remporter les élections, en influençant le débat public et en diffusant des idées traditionalistes sous couvert de mécénat.

Face à ces enjeux, plusieurs collectifs et partis politiques ont dénoncé la tenue de l’événement à Tours. Les Écologistes, La France Insoumise, Tours Antifasciste et le collectif « Touche pas à mon asso » ont organisé une manifestation devant le Grand Théâtre, dénonçant une intrusion du monde politique dans le tissu associatif.

À 18h, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés, scandant des slogans antifascistes et dénonçant les financements opaques de l’événement. Les forces de l’ordre ont rapidement mis en place un cordon de sécurité, et des gaz lacrymogènes ont été utilisés pour disperser le cortège.

Malgré les protestations, la soirée s’est déroulée comme prévu, mais avec une participation réduite. Alors que 800 personnes avaient réservé leur place, seules 400 ont pu entrer dans le théâtre. La levée de fonds a atteint 283 700 euros, un montant inférieur aux années précédentes.

Si la Nuit du Bien Commun permet de soutenir des associations locales, elle soulève une question essentielle : peut-on dissocier mécénat et engagement politique ? Derrière l’image d’un gala philanthropique, cet événement semble être un outil de diffusion d’une idéologie conservatrice, financé par des acteurs proches de l’extrême droite.

La solidarité ne peut être un prétexte pour normaliser des financements opaques et des influences politiques. Il est essentiel de questionner l’origine des fonds et les intentions réelles derrière ces initiatives. La générosité ne doit pas masquer les enjeux démocratiques qui se jouent en arrière-plan.

* Un think tank, ou groupe de réflexion, est une organisation qui produit des analyses, des études et des propositions sur des sujets politiques, économiques, sociaux ou environnementaux. Son objectif est d’influencer le débat public et les décisions politiques en fournissant des idées et des recommandations aux gouvernements, aux entreprises ou aux médias.
Les think tanks peuvent être indépendants, financés par des États, des entreprises, des fondations ou des particuliers. Certains sont progressistes, d’autres conservateurs, et ils jouent un rôle clé dans la diffusion d’idéologies et de stratégies politiques.
Par exemple, en France, des think tanks comme Fondation Jean-Jaurès (proche de la gauche) ou Institut Montaigne (plutôt libéral) influencent les politiques publiques. Aux États-Unis, des groupes comme Brookings Institution (centriste) ou Heritage Foundation (conservateur) ont un impact majeur sur les décisions gouvernementales.
Dans le cas de Pierre-Édouard Stérin, il finance des think tanks conservateurs qui cherchent à structurer une droite radicale et à influencer les débats sur l’immigration, l’éducation ou la fiscalité.